Samuel Paty.

Suite à la publication d’une lettre ouverte de l’avocat de Sefrioui à Emmanuel Macron, la famille de Samuel Paty sort du silence par la voix de son avocate Virginie Le Roy, et dénonce une «provocation».

  •   Pour Samuel, la réponse de la famille du professeur Paty à l’avocat d’Abdelhakim Sefrioui

Tribune. L’avocat d’Abdelhakim Sefrioui dénonce dans la presse une violation présumée de la présomption d’innocence de son client, allant jusqu’à prétendre (entre autres dans une lettre ouverte dans le Point) que sa détention est arbitraire ou que «la justice se trompe de cible».

Il aura fallu cette provocation pour que la famille de Samuel Paty sorte de son silence endeuillé.

Car la mémoire de Samuel Paty ne peut subir l’indécence des postures.

A. Sefrioui s’outrage d’«accusations arbitraires» à son endroit.

A. Sefrioui appelle à un propos «raisonnable et proportionné».

A. Sefrioui dénonce le rugissement d’Internet.

Oui, Internet rugit.

Mais le concernant, il rugit surtout de ses positions et faits d’armes passés.

Pour Samuel Paty, Internet a également rugi, mais il a fait plus encore : instrumentalisé par la haine, Internet a tué, assassiné, décapité.

A. Sefrioui se livre à une révoltante inversion des rôles.

Car dans cette affaire, c’est la présomption d’innocence de Samuel Paty qui a été bafouée, non la sienne.

Car A. Sefrioui n’a pas accordé ce droit à Samuel Paty.

A. Sefrioui a diffusé publiquement le nom de Samuel Paty, le livrant à la vindicte mortifère nourrie d’amalgames entre les cours de l’enseignant et le discours du président Macron sur le séparatisme.

Dans la vidéo devenue virale, ses propos contre Samuel Paty sont sans appel : un «voyou de l’histoire» par lequel «l’abject avait encore eu lieu», répondant à «cet appel de M. le président de la République à haïr les musulmans, à combattre les musulmans, à stigmatiser les musulmans», A. Sefrioui affirmant que «ça fait cinq-six ans que des enfants de 12-13 ans, des musulmans, sont choqués, sont agressés, sont humiliés devant leurs camarades», et que les musulmans refusent «catégoriquement ce genre de comportement irresponsable et agressif, et qui ne respecte pas le droit de ces enfants à avoir et à garder leur intégrité psychologique».

Parce que l’honnêteté intellectuelle participe du respect de la mémoire de Samuel et de la justice qui doit lui être rendue, il est indispensable de rétablir les faits.

Ce qu’A. Sefrioui conteste aujourd’hui n’est pas né avec l’affaire Paty.

L’image relayée par les médias n’est guère nouvelle.

Il en a lui-même été le maître d’œuvre en se mettant en scène notamment comme fondateur du Collectif Cheik Yassine.

Sa biographie est de notoriété publique.  

Et cela n’a aucun rapport avec sa situation pénale actuelle ou avec le respect ou non de ses droits.

Il suffit de parcourir la presse et Internet pour se rendre compte de l’ampleur des actions et combats de celui qui est à la fois fiché Sûreté de l’Etat et inscrit au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste.

Le rappel des actions passées d’A. Sefrioui n’est pas constitutif d’une atteinte à la présomption d’innocence : il s’agit de faits.

A chacun, en toute liberté, de penser ou non qu’ils sont éclairants sur les circonstances et le contexte de l’assassinat de Samuel Paty.

De même, le rappel des propos tenus par A. Sefrioui à l’encontre de Samuel Paty et du rôle qu’il a joué dans l’engrenage ayant mené à son exécution ne sont pas plus attentatoires à ses droits. Ils ne sont que le triste récit de l’attaque menée contre le professeur.

Et une chose est certaine : sans la vidéo diffusée par A. Sefrioui et B. Chnina, Samuel Paty serait en vie.

Sous couvert du respect annoncé à la famille de Samuel Paty, A. Sefrioui tente en réalité de minimiser sa responsabilité, de contredire les faits, se victimisant à outrance en agitant, sans discernement aucun, les outils juridiques et démocratiques.

Force est de constater cependant que la démonstration que ses droits auraient été violés n’est pas faite.

Car il ne suffit pas de citer Robert Badinter ou de se livrer à des comparaisons douteuses avec Erdogan pour réussir l’exercice.

Quant à croire, comme cela est conté, que des juges professionnels verraient leur indépendance entachée par la clameur publique ou les travaux du législateur, cela n’a aucun sens.

Il faudrait alors, à suivre ce raisonnement, museler les médias et mettre l’organe législatif en suspens à chaque fois qu’on juge ?

Outre que cela révèle une piètre opinion de l’indépendance des magistrats, ces propos assoient une méconnaissance totale du fonctionnement des institutions démocratiques.

Le principe même de cette lettre ouverte, adressée pêle-mêle au président de la République, au Premier ministre, aux représentants de nos organes législatifs et au parquet, ignore leur principal fondement : la séparation des pouvoirs.

Car on se demande bien, en l’état, comment Monsieur Emmanuel Macron, Monsieur Jean Castex, ou encore nos Députés et Sénateurs pourraient juridiquement interférer concernant la situation pénale d’A. Sefrioui.

Il va donc falloir qu’A. Sefrioui se résigne à s’en remette à une seule autorité, la seule légitime : la justice.

Et s’il ne fallait pas y voir une méconnaissance de notre droit et de nos institutions, alors cette lettre se réduirait à une simple tentative de communication victimaire.

Comme un coup de plus porté à Samuel.Virginie Le Roy Avocate de la famille de Samuel Paty in Libération.fr

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