In l’Hebdo d’Arrêt sur Image
Le regard de journalistes américains et britanniques sur la question de la laïcité en France, et sur les attentats de Conflans et de Nice, a récemment bousculé médias et internautes. Au Financial Times, au Washington Post comme au New York Times, on a vu dans le projet de loi sur les séparatismes, ou dans les réactions du gouvernement après les attentats, les symptômes d’une islamophobie d’État. Ils ont le droit de le penser.
Mais au-delà de l’analyse, de fausses informations se sont glissées – comme dans cette tribune d’une journaliste du Financial Times qui prétendait qu’aucune femme voilée n’avait jamais mené d’attaque terroriste en France. Et pour contrecarrer certains de ces articles, c’est étrangement le gouvernement français, et notamment Macron lui-même, qui a occupé les colonnes du FT et de Politico. Une drôle d’histoire, que nous vous racontons ici. Autre erreur, celle d’une éditorialiste du Washington Post qui a twitté que les écoliers musulmans en France seraient désormais fichés ; une mésinterprétation du projet de loi séparatisme, dont elle s’est excusée, lire notre récit.
Quelques heures après l’assassinat de Samuel Paty, le New York Times s’était emmêlé avec la hiérarchie de l’information, titrant « La police française abat et tue un homme, après une attaque fatale au couteau dans la rue », avant de rectifier. Au Washington Post comme au New York Times, la couverture immédiate de l’événement est par ailleurs précise, mais le terme « djihadisme » n’apparaît pas. Certains chercheurs français y voient une cécité, qui s’explique par une grille de lecture marquée par le mouvement contre la violence policière envers les Noirs aux États-Unis. Notre analyse est ici (accès libre).
Mais ce regard peut être aussi fécond. Sans les correspondants du New York Times à Paris, nous n’aurions pas pris conscience de l’incroyable « indulgence de l’establishment français à l’égard de Gabriel Matzneff », comme l’écrit Daniel Schneidermann (accès libre). On aurait tort de tourner le dos à ces regards étrangers, et qui nous contraignent à penser « out of the box », « en-dehors de la boîte »… comme disent les Américains.
Emmanuelle Walter, rédactrice en chef.