A l’Elysée pas plus qu’à Matignon donc, rien de nouveau

Cet article illustre bien plusieurs tendances de la politique française.

La première que nous estimons la plus importante, est la prise du pouvoir dans la République par « Bercy ». La fascination pour la star des technos G. Attal fait oublier l’essentiel : la nomination parallèle de son nouveau chef de cabinet, comme par hasard l’ancien Directeur du Trésor, Emmanuel Moulin ; c’est donc son second dont on peut se demander s’il sera plus ou moins instrumentalisé par le Chef suprême ou s’il secondera « loyalement » l’émergence d’un futur Brutus ! En tout cas, il devient aujourd’hui très difficile de croiser dans les allées du pouvoir politique mais aussi économique autre chose que de jeunes anciens du Ministère Universel, gare de triage permettant l’accès express et sans risques au pouvoir, en shuntant les longs et durs chemins de l’élection républicaine ou de la carrière en entreprise privée.

Accéder aux responsabilités sans le filtre de la vraie vie mais avec la garantie et les avantages d’un statut en béton, que vouloir de mieux ? Non seulement cette dérive n’a pas cessé avec Macron I et II mais elle s’est très logiquement accélérée. Bien entendu, ce parcours ayant la caractéristique de formater définitivement les esprits et les comportements, on sait d’avance quelles seront les conséquences d’un casting monocorde : divorce d’avec le peuple, dégradation de l’image et de l’influence françaises à l’extérieur, affaiblissement progressif de l’économie, de la culture, de la défense et de l’éducation autrement dit des bases mêmes de notre République. Le vent remplace la substance, la sincérité fait place à la manipulation permanente de l’opinion.

Seconde dérive en effet : celle qui rend le contenant beaucoup plus important que le contenu, l’immédiat bien plus important que l’avenir, l’apparence chassant l’essentiel. L’hégémonie des réseaux sociaux qui peut aussi s’analyser comme l’apogée du consumérisme politique national et international, avec des « solutions » au décrochez-moi affectées de sujets complexes (en six mois à l’Educ, tout est résolu !), du civisme jetable avec « les » CNR, a eu pour conséquence que les gens pressés, nouveaux Rastignac de la politique, se moquent comme de l’an quarante de ce qu’ils vendent, des produits auxquels ils sont trop malins pour croire eux-mêmes si tant est qu’ils croient à quelque chose. Seul compte en fait le « chiffre d’affaires » de voix à engranger pour la prochaine campagne. De dessein à long terme pour le pays, point !

Ainsi le choix du nouveau premier ministre dont les critères principaux, si l’on a bien compris, sont d’être très bon communicant, jeune et gay, fait souffler un vent nouveau pour ceux qui s’en tiennent aux apparences. Mais l’air en est plutôt vicié comme en témoigne le vocabulaire (reconquête, renaissance, réarmement etc.) qui rappelle des époques peu glorieuses de notre gouvernance et pour tout dire, sent la francisque. Peut-être est-ce voulu après tout, pour mieux s’adresser à tous les « segments » de l’électorat selon le marketing présidentiel : le vocabulaire réactionnaire sera pour les « vieux », l’exaltation des carrières fulgurantes pour les jeunes et les classes moyennes et pour les masses inquiètes, Darmanin roulera des mécaniques. Personne ou si peu, ne s’intéresse à ce qu’il y a et qu’il y a aura vraiment derrière tout cela, on se grise soi-même de la magie du Verbe et on tente d’en griser les Français.

Enfin, et c’est tellement dommage pour la gauche qui sera toujours, en France ou ailleurs, nécessaire à l’alternance laquelle est une condition nécessaire de la démocratie, il faut bien constater que bien des météores encombrant actuellement notre ciel politique sont issus de « Solférino » autrement dit des différents courants du PS. Cette tendance se marie bien avec le technocratisme qui a infecté le vieux et noble parti ci-devant populaire mais qui a perdu ses repères, le soutien sans réserve à l’UE libérale venant se substituer à la défense et promotion des moins favorisés. Ce faisant, il a perdu ses électeurs. De fait, les strauss-kahniens ont fourni à la nouvelle droite orléaniste un beau contingent mais les entourages des autres éléphants roses ne sont pas en reste. Il est d’ailleurs savoureux -et significatif- de voir une couverture de « Libé » faire rimer Attal et loyal ce qui voudrait dire au fond qu’il n’y a pas de différence entre cette vision du « socialisme » et le macronisme, donc les Macron, Borne, Attal et tutti quanti n’ont pas trahi ; seule compte leur loyauté temporaire au Chef depuis qu’ils ont viré leur cuti ! C.Q.F.D. Tant que les tronçons du PS continueront à se croire au Congrès de Tours (1920) en prenant LFI comme cible principale, il y a donc peu d’espoir si ce n’est dans les autres composantes de la gauche : radicaux, communistes, libertaires ainsi que dans les écologistes authentiques.

A l’Elysée pas plus qu’à Matignon donc, rien de nouveau, seule l’étiquette a changé mais les tendances de fond restent les mêmes, encore accentuées sans doute. On s’aperçoit de plus en plus que tout comme les démocraties peuvent opprimer et le font souvent, la technocratie au pouvoir devient de plus en plus démagogique, prêtant ainsi le flanc à plus démagogue qu’elle dans une course en sac xénophobe perdue d’avance. Normal puisque ce que fuit tout énarque pantoufleur, c’est le débat qu’il ne faut pas confondre avec la discussion qu’il aime, elle, car elle lui permet de briller. Ce milieu semble, en fait, vouloir incarner les défauts naturels de notre nation (superficialité, confiance outrancière dans l’intelligence abstraite, hubris national décliné à la sauce européenne) mais malheureusement sans ses qualités dont le bon sens qui sont restées l’apanage du reste de la population. Ces qualités ne sauraient s’exprimer qu’en donnant la parole et le pouvoir, autant que possible, à celles et ceux qui le méritent. Or cela qui n’est possible qu’en équilibrant le casting du pouvoir, en travaillant dans la durée et la délégation des responsabilités, en fortifiant les structures et la cultures de la République plutôt que de les affaiblir. Et surtout, en revenant à un principe très simple, étranger par nature à tout administratif étranger au service public : prendre pour source de l’autorité la décision populaire organisée et son respect. Un élu n’est pas un chef de service. La solution n’est donc pas de recréer l’univers de Bercy pour conduire la République.

Attal : du strausskahnisme à Matignon, l’itinéraire d’un professionnel de la politique

Propulsé à la tête du gouvernement, Gabriel Attal a connu une ascension symbolique du Parti socialiste finissant et de la genèse du macronisme : la promotion de jeunes apparatchiks devenus de bons communicants.

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On avait déjà eu l’épisode Blanquer, on a eu celui de la rectrice de l’Académie de Versailles, maintenant on a une ministre qui préfère mettre ses têtes blondes à « Stan », dont la philosophie n’est même pas celle de l’Ecole Alsacienne.

Quand les derniers partisans « de gauche » (sic) du Macronisme comprendront-ils que le véritable but de cette caste est de remplacer notre bel édifice d’une école publique qui soit la véritable école libre pour tous par un système à 2 vitesses, largement inspiré de ceux des pays anglo-saxons.

Incapables de faire le ménage dans les mauvaises habitudes et certaines conceptions surannées des caciques (issus du même cadre qu’eux) de l’Educ’ et d’y mettre les moyens à commencer par un ministre solide et stable, ces gens préfèrent s’en prendre au « front office » des enseignants, des surveillants et des directions d’établissements tout en faisant de la démagogie à propos des uniformes ou des abayas.

Et mettre leurs enfants dans le privé ou y faire carrière tout en osant se référer à la Laïcité. Du toc, rien que du toc et toujours davantage d’injustice et d’hypocrisie : exactement le contraire du climat dans lequel les futurs citoyennes et citoyens devraient grandir et de l’exemple qu’ils attendent. Le tic du macro-énarchisme, c’est le tok.

La ministre de l’éducation a choisi un établissement privé ultra réac pour ses enfants

À Mediapart, Amélie Oudéa-Castéra justifie son choix de scolariser ses enfants dans le très catholique collège-lycée Stanislas en raison « des paquets d’heures pas sérieusement remplacées » dans le public. Nos révélations sur cet établissement ont conduit à un rapport de l’inspection resté confidentiel, dont la ministre affirme qu’il « n’est à l’heure actuelle pas sur son bureau ». 

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Photo de la revue de presse : Gabriel Attal et Amélie Oudéa-Castera le 12 janvier 2024. Crédit : Europe 1.

Jean Levain LRDG29

Jean Levain est ancien Maire de Chaville de 1995 à 2008, secrétaire national des Radicaux de Gauche LRDG et auteur.

Retrouvez la revue de presse de Jean Levain accompagnée de ses réflexions sur l’actualité nationale et internationale qu’il livre pour la fédération LRDG en Finistère.

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